La question des manuels scolaires

Chaque année, au moins deux fois par an, la question des manuels scolaires fait irruption dans le quotidien du professeur documentaliste. Toutes les situations sont alors possibles selon l'organisation mise en place dans l'établissement...

Mis à jour le 9 juin 2019

De l'invivable à l'équilibre

Du "on vous confie la tâche de A à Z" - et ce au grand mépris des textes officiels et de l'intérêt général - dans une ambiance parfois conflictuelle et même dans les cas les plus extrêmes avec du harcèlement à la clé, jusqu'aux situations satisfaisantes qui voient une répartition équilibrée des tâches entre les différents personnels, les situations sont d'une grande hétérogénéité.

 

Par tradition, par habitude ou par facilité, certains chefs d'établissement évitent ou refusent de réfléchir à des fonctionnements collaboratifs, et dans ce cas, le professeur documentaliste peut être désigné comme unique responsable, parfois sous couvert de sa prétendue compétence s'agissant de livres (!).

 

Une note circulaire académique

Il y a une quinzaine d'années, en 2004, une note circulaire académique(1) signée des trois IA-IPR EVS était envoyée dans les établissements : elle rappelait les règles de gestion collégiale de la distribution et de la collecte des manuels scolaires et faisait ressortir les responsabilités de chaque service ou personnel dans cette opération. Cette note circulaire rappelait simplement le sens des textes officiels concernant la gestion des manuels scolaires.

 

Vers une répartition des tâches

Des formes d'organisation existent où chacun, conscient de ses responsabilités et soucieux d'effectuer un travail collectif au service de l'intérêt général, apporte sa compétence et sa bonne volonté. Force est de constater que la situation a atteint dans quelques établissements un point de blocage que nous déplorons mais ne saurions accepter.

S'il n'est pas question de refuser de participer à cette opération à la hauteur des "compétences techniques" mentionnées dans les textes officiels et repris par la circulaire académique de 2004, les professeurs documentalistes ne sauraient pour autant être les seuls à gérer l'ensemble de l'opération. Rappelons qu'en fin d'année, les tâches qui leur incombent sont légion :  désherbage, inventaire des fonds, assainissement de la base documentaire, bilan de l'année écoulée, préparation des projets pour l'année suivante, rédaction des bilans et projets, participation aux différentes réunions dans l'établissement... pour n'en citer que quelques-unes.

 

Arguments en stock

Faire évoluer la situation dans son établissement peut prendre du temps lorsque les préconisations officielles sont reléguées au placard. Voici quelques arguments pour celles et ceux qui doivent encore "négocier".

  • En premier lieu, rappeler que nous ne sommes pas responsables des manuels scolaires (et d'ailleurs nous n'en gérons pas le budget, nous ne les choisissons pas, etc.),
  • avoir les textes officiels sous le coude et ne pas hésiter  à les sortir devant les personnes concernées (voir les liens utiles proposés ci-dessus),
  • fournir et expliciter les exemples d'organisation existants,
  • travailler à un protocole de répartition des tâches qui soit satisfaisant de votre point de vue, adapté, négocié, écrit noir sur blanc et clairement présenté, et le proposer comme alternative,
  • faire valoir qu'une organisation collaborative et rigoureuse est un signe positif envoyé aux élèves (et que l'inverse  est tout aussi vrai),
  • démontrer que l'on ne peut PAS concrètement tout faire soi-même puisqu'on n'est pas aux postes clés : le secrétariat pour les exeat et le filtrage lors des réinscriptions, l'intendance pour le suivi des facturations et le retour des manuels en retard, la vie scolaire pour le suivi des élèves, le professeur principal pour l'autorité sur ses élèves...,
 Photo d'Elvire.R. (Flickr)
Photo d'Elvire.R. (Flickr)
  • rappeler qu'une gestion concentrée sur une seule personne est forcément source d'erreurs tandis qu'une segmentation des tâches et des responsabilités permet à chacun de maitriser  son rôle et d'agir de façon plus sereine et plus efficace. Par exemple, gérer les 26 élèves d'une classe est faisable tandis que gérer les 600 ou 1000 élèves de l'établissement relève de l'absurde,
  • arguer du fait qu'il est risqué pour l'établissement que tout repose sur les épaules d'une seule personne, laquelle pourrait être absente pendant la période concernée,
  • lister toutes les tâches de fin d'année qui ne pourront être menées alors qu'elles sont importantes et montrer les conséquences de ce travail non fait,
  • montrer que le CDI est un espace commun de travail jusqu'à la fin de l'année pour les élèves, pour les personnels et pour vous, que l'espace continue d'être occupé à ces fins, et que par conséquent les manuels ne sauraient y être stockés - d'ailleurs, le fait que les manuels soient stockés ailleurs qu'au CDI est un signal fort envoyé à la communauté -,
  • proposer que les manuels soient gérés durant l'année par l'équipe Vie scolaire,
  • montrer l'impact financier pour l'établissement d'une organisation fonctionnant mal (le suivi des facturations, par exemple),
  • faire des bilans écrits mettant en avant les points positifs s'il y en a, et les dys-fonctionnements constatés ainsi que leurs conséquences, et proposant des améliorations.

Sur cette question des manuels scolaires, il ne faut pas lâcher prise car c'est en montrant sa détermination sur la durée et en tenant un discours cohérent, ferme, pérenne et ouvert que l'on parviendra à remodeler l'existant. On n'oubliera pas également de rappeler tout cela au cours de l'année. Et pour pouvoir être entendu de façon élargie, rien de tel qu'une réunion en amont avec les personnels concernés, à laquelle vous irez avec vos arguments et vos propositions, le tout écrit noir sur blanc. 

 

Pour une (re)connaissance de notre métier

Nous souhaitons renvoyer au référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l'éducation (BOEN n° 30 du 25 juillet 2013 ) et rappeler que notre rôle pédagogique est essentiel pour former les élèves à une culture de l'information, ce que nombre de grandes institutions appellent de leurs vœux. Rappeler aussi que la mise en cohérence globale du centre de documentation, de ses fonds et de ses espaces a du sens, est importante et nécessaire, est un acte pédagogique.

 

Sortir de cette querelle stérile des manuels scolaires par une collaboration sereine, comme le demande l'institution, témoignerait d'une véritable (re)connaissance de notre métier. Il faut que cesse le mépris ou le désintérêt pour nos missions à l'heure où nous souhaitons plus que jamais faire valoir  dans nos établissements la richesse de nos compétences et plus spécifiquement la dimension pédagogique de notre travail.

 

 



(1) Cette note est disponible sur le site Doc pour Docs à l'adresse suivante : http://www.docpourdocs.fr/IMG/pdf/note_circul_gestion_des_manuels-2.pdf


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